CHANGEMAKER STORIES - MATTHIEU WITVOET

Matthieu Witvoet est l'un des porteurs de projet soutenus par le fonds de dotation Impact 2024. Eco-aventurier, Matthieu est convaincu que le sport est aussi un excellent levier de sensibilisation à la crise écologique. A travers ses défis sportifs, il alerte les gens sur des problématiques environnementales précises et les incite à agir.

Comment est né votre engagement en tant qu'éco-aventurier ?

Tout a commencé en 2017, après mes études, lorsque j'ai décidé de faire un tour du monde à vélo avec mon cousin. À cette époque, nous prenions conscience du problème de la pollution plastique, mais il était encore peu médiatisé. Nous avons alors eu une idée : trouver des solutions pour lutter contre les déchets plastiques et rencontrer des porteurs de projets innovants. Un an et 18 000 km plus tard, nous avons recensé plus de 300 solutions à travers le monde : bioplastiques en Indonésie, recyclage dans les favelas au Brésil, systèmes de recyclage d'emballages très complexes en Afrique du Sud... Et nous avons réalisé une web-série sur les 15 plus inspirantes. Au retour de ce voyage presque initiatique, avec la conviction qu'il faut déployer les solutions existantes, j'ai rejoint les équipes de Circul'R pour créer une communauté d'échange entre 50 grands groupes, 50 solutions circulaires, et en partenariat avec le ministère de la Transition écologique.

Depuis, il y a eu beaucoup de nouvelles aventures. Pouvez-vous nous en parler ?

Parallèlement à mon travail, je me lançais dans d'autres défis, comme la traversée du détroit de Gibraltar à la nage. L'idée était de le faire de manière idéale, en prenant le train, en faisant 100% zéro déchet, ou en préparant nous-mêmes tout le ravitaillement. 

Une première aventure à la nage qui m'a donné envie, avec ma copine et mon frère, de faire quelque chose de plus grand et de plus proche de chez moi : Croissy sur Seine. C'est là qu'est née l'idée d'utiliser la Seine comme terrain de jeu et de s'attaquer au déchet le plus répandu dans les océans : le mégot de cigarette. Un petit déchet qui contient plus de 4000 polluants et qui est capable de polluer 500 litres d'eau. En juin 2021, nous avons organisé la plus grande collecte de mégots jamais réalisée, avec 855 000 mégots collectés en 3 heures par plus de 1 000 personnes dans tout Paris. Nous avons ensuite descendu la Seine à la nage en relais, pour symboliser le voyage d'un mégot de la capitale à la mer, à 380 km de là. 

Suite à ce défi, le paranageur Théo Curin m'a invité, avec Malia Metella, à relever un nouveau défi avec lui : la traversée du lac Titicaca en autonomie. Après 14 mois de préparation, nous avons nagé plus de 120km à 3 800m d'altitude dans une eau à moins de 15 degrés en tirant notre maison de 500kg : un bateau éco-conçu récupéré auprès de l'association Plastic Odyssey. A travers ce projet, au-delà de la performance sportive, nous avons voulu alerter sur la pollution du lac, mettre en avant les solutions et, plus largement, sensibiliser aux enjeux environnementaux et climatiques. Par exemple, nous avons aidé une association locale à mettre en place un bateau poubelle pour collecter et traiter les déchets plastiques sur les deux plus grandes îles au lieu de les brûler directement. 

"Le sport a le pouvoir de faire vivre des émotions aux gens et lorsque vous ressentez cette émotion, vous devenez plus réceptif au message.

Vos projets sont toujours des défis spectaculaires associés à des problèmes environnementaux réels. Est-ce la meilleure façon de sensibiliser les gens ?

Une grande partie du changement que nous devons réaliser est un changement de comportement. Avec l'affirmation "jetez votre mégot dans la poubelle", nous essayons de mettre en évidence un problème et d'apporter une solution individuelle qui peut être rapidement adoptée. Au-delà de ces aventures sportives, c'est toute une histoire que nous racontons : nous voulons créer un storytelling autour d'un message solide pour inciter les gens à réfléchir à leur comportement avec émotion. 

Vous avez été lauréat d'Impact 2024, en quoi ce dispositif vous a-t-il aidé à déployer votre projet de sensibilisation par le sport ?

Impact 2024, c'est une coïncidence ! J'étais dans le train pour Annecy, et je parlais de mon défi Lac Titicaca à mon voisin, que je ne connaissais pas, et il m'a conseillé de répondre à l'appel à projets Impact 2024. Le lendemain, nous avons lancé le processus. En plein tournage d'un documentaire pour 0 Mégot une Vague d'Espoir, nous nous sommes dit que l'appel à projets serait un excellent moyen de le diffuser et de sensibiliser un maximum de jeunes dans les écoles. Nous avons postulé et nous avons gagné. Cela nous a permis de promouvoir le documentaire d'une manière inattendue. Cela a pris du temps, notamment à cause de Covid, mais aujourd'hui le film a été projeté devant plus de 5 000 élèves de Paris à Montpellier. Il séduit les jeunes car, à travers cette histoire, nous racontons notre engagement de manière visuelle et directe, ce qui leur donne envie de le faire. Et le message ne s'arrête pas au mégot de cigarette. Nous voulons montrer à tous que lorsqu'un problème nous touche, le meilleur vaccin contre le désespoir est l'action. Il y a toujours quelque chose à faire !

Vous abordez ces sujets en lien avec le sport parce que vous êtes passionné, mais pour vous, quel est le rôle du sport dans la transition écologique ?

Pour moi, il est essentiel d'inspirer et d'interpeller sans culpabiliser. Tous ceux qui m'ont sensibilisé sont des gens qui m'ont raconté leur histoire avec passion. Le sport peut faire ressentir des émotions, et quand on ressent cette émotion, on devient plus réceptif au message. On peut alors se dire : "S'il le fait, pourquoi pas moi ? C'est ainsi que le sport et les événements sportifs peuvent mobiliser les gens et contribuer à ces changements de comportement. 

Et selon vous, comment les grands événements sportifs devraient-ils se réinventer dans cette perspective ?

Il y a deux choses différentes. D'une part, il faut réduire l'impact environnemental et d'autre part, il faut augmenter les retombées positives de l'événement. Parlons des effets positifs : si quelqu'un mange un steak végétal pendant un événement de Paris 2024 et se rend compte que c'est bon, sain et écologique, cela peut l'inciter à changer de régime alimentaire. Et cela semble pertinent quand on sait que l'alimentation est le 1er facteur de déforestation dans le monde. Pour moi, l'héritage de Paris 2024, c'est aussi cela : inviter les millions de personnes, de partenaires et de gouvernements qui suivent leurs athlètes préférés pendant les 30 jours des Jeux Olympiques à changer leurs comportements, leurs investissements et leurs législations.

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